mardi 27 mai 2014

Jamais deux sans trois / Avril 2014


I Shall Die Here, THE BODY (+ THE HAXAN CLOAK), RVNG



(Christ, Reedeemers + Excavation ) ² , l'alliance la plus brutale et audacieuse depuis les chips aux huîtres...



Deep/Float, SAÅAD, Hands in the Dark




Les alpinistes du drone Romain Barbot et Greg Buffier nous laissent au pied du mur en atteignant le sommet...



Poisse, FANGE, Cold Dark Matter




Sournois, sale et vicieux : la chance de l'écouter, la poisse dans les oreilles...

lundi 26 mai 2014

The Dream in Captivity, CLIFF DWELLER, Patient Sounds / Syllepsis, MOTION, Wood & Wire / Avril 2014




       Il arrive parfois qu'un disque découvert trop tard soit aussi un disque trop bon. Il arrive aussi, coup de cœur aidant, que l'on se promette à tout prix de toucher un mot sur l'artiste, même un seul, à la moindre prochaine occasion. Et pourtant depuis la sortie de l'immense Emerald City en novembre 2012, je n'ai toujours pas parlé de Cliff Dweller, et en toute subjectivité de son caractère immanquable.

       Erreur désormais réparable avec The Dream In Captivity ! Différent, le rêve d'Ari Balouzian (ses multiples paysages, son folklore impressionniste, son Amérique étrange et fantasmée...) se retrouve enfermé, figé... l'inspiration éclectique (jazz, trip-hop, folk...) symptôme d'esprit bouillonnant, de liberté expansive et d'univers complexes se mue en un ambient plus resserré, faussement monolithique... Mais tout comme Cliff Dweller n'est pas une musique, mais des musiques, le rêve est multiple et sait l'exprimer. Dans ses accents les plus désespérés, le rêve se développe, se sépare... il est à tiroirs, à étages, il s'entrechoque, se mélange lui-même malgré l'enfermement. Il est comme le souvenir coincé dans le verre d'une boule à neige (à la différence qu'il n'est pas de ceux que l'on pose et laisse prendre la poussière) où les flocons s'activent sous les secousses. Cliff Dweller agite son rêve sous nos oreilles et nous laisse à la contemplation. Surgissent ainsi ça et là les éléments, les boucles, les fields, les orchestres (comme souvent on y retrouve Max Whipple au piano et à l'accordéon) et les bruits en tous genres... qui parfois s'éteignent et s'absentent... (on ne se souvient pas toujours de tout lorsque l'on rêve) puis reviennent... Tout cela se termine en un tumulte rock lo-fi écorché vif rythmé par les assauts du batteur James Levine. Le rêve brisé dans un fracas, la liberté reprend le dessus... le groupe semble annoncer qu'encore une fois la suite ne sera qu'imprévisible...

       S'il a fallu rectifier le tir, avec Cliff Dweller pas question de louper le coche avec le Syllepsis de Motion (et pour ça remercions Sb de Nova Express). Pas question en effet de laisser passer un album aussi bon que singulier, d'un groupe aussi aventureux qu'il ne m'était auparavant inconnu. On évitera de se flageller pour se caresser les oreilles!

       Direction Wood & Wire, le label australien à la pyramide! Le groupe reprend la charte triangulaire du catalogue pour son artwork, mais se veut musicalement bien plus fin et complexe que ses voisins, adeptes d'un bruitisme aussi abrupte que délectable (Black Pines, Regional Curse, Adam Cadell...). Leur truc à eux, c'est le jazz, qu'ils s'efforcent de revisiter depuis 2008 sous le prisme de l'expérimental improvisé. Ils détricotent et retricotent à leur manière avec la technicité irréprochable d'une équipe d'experts comptable fans de Coltrane... ajoutant sur cet album la fantaisie créatrice touche à tout de Kynan Tan, dont les assemblages électroniques marquaient déjà en 2011, dans une version remixée du premier album Presence, une volonté extrêmement forte de s'affranchir du simple statut de quatuor instrumental. Les bruits et les collages s'invitent à la rencontre de mélodies dessinées progressivement... par les pianos, les cuivres, qui s'égarent. Proche d'un Badun, par exemple, le détricotage est pourtant plus propre et limpide, nettement moins subversif... juste une belle pièce de jazz avant-gardiste, en cinq actes de tension : comme le jazz déstructuré de Two, parfait exercice d'équilibriste entre technique pédante et harmonies magnétiques... ou la plus belle démonstration de sensibilité, presque post-rock, de la conclusion Five...

       Vous l'aurez compris, deux disques trop bons découverts à temps, dans une chronique publiée en retard... deux disques surprenants, affranchis de toutes contraintes et surtout d'eux-même... amen!

Riton

The Dream in Captivity en trois mots : onirique, magnétique, imprévisible

Syllepsis en trois mots : magnétique, sensible, affranchi



Si vous aimez ces albums, vous aimerez peut-être :

  • Emerald CityCLIFF DWELLER, Autoproduction, 2012 : Avec The Dream In Captivity, l'Album avec un grand A de Cliff Dweller : mélange de contes fantastiques et d'Amérique des diligences... un peu comme si l'on faisait un crossover entre Twin Peaks et Carnivale (Carnivale étant mine de rien déjà très lynchien)

  • PresenceMOTION, Listen/Hear Collective, 2010 / Re : Presence – Motion Remixed, MOTION, Listen/Hear Collective, 2012 : Le premier album de Motion et sa version remix (par Shoeb Ahmad, Giorgio Magnasensi et Kynan Tan, le tout masterisé par le fameux Taylor Dupree) : transition radicale entre un quatuor jazz agréable, ni plus ni moins, et sa transformation expérimentale.

  • The Drowned World, MOTION, Listen/Hear Collective, 2012 : Un album plus darkjazz déjà presque aussi renversant que Syllepsis. Le groupe tient ses promesses d'expérimentateur aventureux.