lundi 31 janvier 2011

Bardo Pond, BARDO POND, Fire Records, décembre 2010 (Par Gagoun)



       Quoi de mieux pour fêter cette première chronique et entamer l'année 2011 qu'un petit Bardo Pond. Bon d'accord, ce nouvel album éponyme est sorti en France en décembre 2010...mais si vous êtes américains, ça marche! On sait jamais...
Une production Fire Records passée presque inaperçue dans le petit monde du rock indé mais ô combien passionnante!!!

       Car certes Bardo Pond n'est pas un nouveau venu, certes les cinq lascars de Philadelphie ne vont pas souffler un vent de fraîcheur dans nos oreilles indépendantes mais leur nouvel album se base sur des valeurs sûres, celles qui ont fait leur "succès" au milieu des années 90.

       Donc rien de très nouveau sous le soleil de Bardo Pond! Un soleil de plomb, déclinant, de fin de journée ou caché par une éclipse mais un soleil quand même. Ici tout est lourdeur, mélancolie et psychédélisme. Un style inchangé que les critiques qualifient souvent de space rock ou de "Psychedelphia" (les amateurs apprécieront la finesse du jeu de mot...). Voilà pour le ton, comme à l'accoutumée.

       Aussi dans l'univers du groupe, tout est simplicité, émotion brute et ce Bardo Pond ne déroge pas à la règle. A cet égard, la pochette illustre parfaitement le propos. Des accords de guitare qui tournent encore et encore jusqu'à l’envoûtement, des murs sonores qui se dressent de manière progressive, prenante et qui se montrent dignes des grandes heures de My Bloody Valentine... vous l'aurez compris, le groupe ne fait pas dans les formats "3 minutes, emballez, c'est pesé!". Les sept morceaux prennent le temps de se développer avec pour apogée un "Undone" de pas moins de 20 minutes qui monte, qui monte jusqu'à l'explosion finale. Magistral! De ces morceaux dont on ne se rend compte de l'ampleur et de la puissance qu'une fois terminés... Au final, Bardo Pond nous propose un album compact, souvent "down-tempo" malgré quelques exceptions plus enlevées qui rappelleront à certains la tonalité d'un Amanita, souvent considéré comme leur chef d'oeuvre.

       Et puis parfois, le son baisse de volume, l'intensité redescend et laisse place aux guitares acoustiques, aux ambiances psychédéliques et légèrement noisy. Quelques flûtes apparaissent et accentuent encore le contraste entre cette légèreté psyché, ces boucles de guitares entêtantes et la lourdeur de l'atmosphère générale. Comme une ritournelle qui aurait mal tourné... Et cette voix... Celle d'Isobel Sollenberger étrange mais tellement envoûtante. Elle connait une progression sur toute la durée de l'album qui fait, à mon sens, la beauté de celui-ci. Fragile, parfois à la limite de la justesse au début (de "Just Once" à "Undone"), elle contraste avec une instrumentation souvent puissante dirigée par les frères Gibbons et la précision de frappe d'Ed Farnsworth. Mais au fil du temps et des morceaux qui passent, elle gagne en assurance, s'intègre de plus en plus à la musicalité du groupe (ah les joies de la reverb!) pour atteindre une beauté et une puissance rarement entendues sur "Cracker Wrist" et "The Stars Behinds".

       Au final l'oeuvre singulière de Bardo Pond reste fidèle à elle-même à travers cette nouvelle galette. Pas de grandes nouveautés ou de surprises, juste une question d'émotions et à vrai dire cet album est celui qui m'a le plus touché depuis Amanita. A écouter le soir dans son lit pour les moments de solitude et de petites déprimes si, comme moi, vous êtes un peu maso...

Gagoun

Bardo Pond en trois mots : envoûtant, puissant, psychédélique


Si vous aimez cet album, vous aimerez peut-être : 

  • Amanita, BARDO POND, Matador Records, 1996 : le deuxième album de nos amis américains se trouve être un grand album de rock indépendant des années 90 aux côtés de Sonic Youth qui sortait le superbe Washing Machine juste un an auparavant. Comme ce dernier, les murs de son, les ambiances pop et les dissonances font légions. Bardo Pond se distingue cependant de ses ainés par un son plus épais, un côté éthéré.

  • Loveless, MY BLOODY VALENTINE, Creation Records, 1991 : l'album qui a inspiré tout une génération de shoegazers en herbe et qui a instauré le dictat de la pop éthérée et des "walls of sound"

  • Methodrone, THE BRIAN JONESTOWN MASSACRE, Bomp! Records, 1995 : sans doute l'album le plus shoegaze de la bande d'Anton Newcombe. Pour une leçon de revival psyché, écoutez tous les autres!

  • The Stone Sentinels, ALASEHIR, Archive, 2007 : Alasehir est un des nombreux projets parallèles des membres de Bardo Pond. Plus expérimental, plus stoner que pop, cet album est basé sur des jam sessions comme Bardo Pond sait les faire. Un disque difficile d'accès mais qui a au moins le mérite de faire découvrir un aspect de la face immergée de l'iceberg Bardo Pond.

  • Heavy Deavy Skull Lover, The Warlocks, Tee Pee Records, 2007 : THE album du genre selon moi. Une oeuvre rongée par la folie, des mélodies superbes, possédées, une basse à faire trembler les fondations du World Trade Center, un album à écouter une fois dans sa vie (au moins)!


Dye It Blonde, SMITH WESTERNS, Fat Possum, janvier 2011 (Par Riton)



       C'est dingue le nombre de jeunes musiciens squattant très tôt les bancs du rock indé ces derniers temps aux Etats-Unis. A croire que la musique y est servie au biberon et que l'environnement est favorable à toutes sortes de prédispositions créatives. Si 2010 a eu son lot de talents avec entre autres en tête de liste Wavves, Best Coast ou encore Avi Buffalo, 2011 débute sur les chapeaux de roues avec Dye It Blonde, deuxième album des chicagoans de Smith Westerns fraîchement sorti chez Fat Possum (drôle de nom pour un label, mais à la vue du catalogue l'animal est plutôt de bon goût).

       Résolument tourné vers les années 60 et moins Lo-fi que son prédécesseur, cet album mériterait déjà d'être classé parmi les références en matière de pop du nouveau millénaire. Parce qu'au fond, à quoi reconnait-on un véritable bon album de pop? Je ne pense pas avoir les clés de l'énigme mais quelque chose me dit que la joyeuse bande à Cullen Omori, d'à peine 20 ans de moyenne d'âge, en possède quelques trousseaux.

       D'aspect général enjoué, l'album enchaîne les tubes de façon presque déconcertante. En effet, s'il y a un bien une caractéristique frappante à chaque écoute, c'est la relative cohérence de l'ensemble; comme-ci les morceaux avaient été composés dans l'ordre que nous connaissons. Ajoutons à cela que chacun d'eux est une véritable bombe de mélodies, rappelant les meilleures heures du groupe T-Rex. La voix de Cullen Omori se rapproche d'ailleurs étrangement de celle de Marc Bolan, légèrement plus douce et nonchalante, comme-ci ce dernier était revenu plus de trente ans après pour parler des filles et des douleurs adolescentes. Les guitares, chantantes, tantôt claires, tantôt fuzzy, arrivent à leur sommet lors de solos particulièrement intenses ("Still New", "Imagine Pt. 3", "Fallen In Love"). Le tout est servi par une production parfaite, chaleureuse, une production vintage des années 2010, sentant les lampes à plein nez.

       En résumé, Dye It Blonde est un album à la T-Rex, en moins glam et plus juvénile, en moins pailleté mais tout aussi accrocheur. On imagine des répétitions à l'arrière d'un van, des clins d'oeil échangés avec une cheerleader, des concerts privés lors de soirées étudiantes... Après écoute, on le réécoute, encore et encore, et l'on se surprend à chanter au réveil, sous la douche, en voiture...

       Voilà de quoi répondre à la question initialement posée : Dye It Blonde devrait ravir les amateurs de pop indé mélomanes. On souhaite vivement à Smith Westerns de continuer ainsi. Et si ce vent de jeunesse apporté à la scène indé pouvait faire encore plus d'émules de cette qualité, je m'engagerais personnellement à fournir les dispenses aux proviseurs... parce que, qu'on se le dise, qu'est-ce c'est bon!

Riton

Dye It Blonde en trois mots : frais, pop, jubilatoire


Si vous aimez cet album, vous aimerez peut-être : 

  • The Slider, T-REX, Fat Possum, 1972 : 7ème album de la bande à Marc Bolan (et 3ème sous le nom de T-Rex), un classique du genre, fraîchement réédité par Fat Possum...étrange non? Rock On!

  • Crazy For You, BEST COAST, Wichita Recordings, 2010 : si les Smith Westerns avaient été californiens, il ne fait nul doute qu'ils auraient parlé plage, amours et soleil... c'est ce que fait la belle Bethany Constantino (j'aurais très bien pu dire "magnifique" ou "tout à fait à mon goût") avec son acolyte Bobb Bruno dans cet album. Une surf-pop rêveuse de haute volée.

  • King Of The Beach, WAVVES, Fat Possum, 2010 : le pendant masculin et poilu de Best coast, plus agressif, plus énergique... le nom de l'album annonce la couleur : les Wavves sont les Beach Boys d'aujourd'hui.

  • Avi Buffalo, AVI BUFFALO, Sub Pop, 2010 : premier album et directement chez Sub Pop... ce n'est pas étonnant tellement la filiation avec les Shins est facile. Probablement mon plus gros coup de coeur indie-pop de l'année 2010. En un mot : beau!