mardi 1 novembre 2011

Dear And Unfamiliar, BIRDS OF PASSAGE & LEONARDO ROSADO, Denovali, Octobre 2011 (Par Riton)



       Dear And Unfamiliar, c'est une rencontre des antipodes... géographiques, mais pas musicales... fruit de la collaboration entre Alicia Merz, néo-zélandaise officiant sous le nom de Birds Of Passage, et Leonardo Rosado, artiste portugais protéiforme, musicien, poète, photographe... Chacun explore à sa manière deux facettes de la musique drone, empruntent des voies différentes mais sensiblement complémentaires et profitent le temps d'un album de l'opportunité de nous embarquer littéralement sur le fleuve d'une musique bicéphale : d'un côté la poésie de l'océanienne si merveilleusement interprêtée, et de l'autre les motifs borderline du lusitanien, le tout à travers un habituel flot de reverbe et d'écho... un voyage contemplatif au pays de la zenitude, sauf qu'ici exit les mélodies folkisantes du Without The World de la belle et place à une approche plus ambient et épurée.

       Un album orangé (l'artwork est tout droit sorti du pinceau de Leonardo Rosado) aux allures de procession spirituelle. Les deux musiciens (apparaissant en noir sur la pochette... du moins en toute logique) nous prennent par la main et nous emmènent quelque part entre l'Inde et les cieux. Mais attention le couple ne tombe pas dans le piège du trip new age sans saveur et fait les choses en grand. Les compositions de Leonardo Rosado s'avèrent être d'une rare finesse et d'une complexité déconcertante de beauté : ses synthés et ses quelques guitares se mélangent à des sonorités plus inconnues... concrètes... glitch... ou l'on ne sait trop quoi... parfois pulsées de manière extrèmement déconstruites ("You Wore Blue", "Of Your Charm" et ses percussions presques animales, "To Wander Slow With Me"...) parfois étirées sans autre point de repère que la voix si douce et rassurante d'Alicia (le magnifique "We'll Always Have Paris", le non-moins extraordinaire "Your Lullabies"...). S'en est à se demander si autre collaboratrice (ou collaborateur) aurait pu faire l'affaire tant cette voix parait ancrée, indissociable.

       A noter également l'excellent travail de production de Nils Frahm (lui-même a sorti un album solo des plus intéressants ce mois-ci... entièrement au piano), qui derrière l'apparente massivité des résonances de cette musique a réussi un tour de force en arrivant à laisser chaque détail s'exprimer... suffisamment pour qu'à chacune de mes écoutes ceux-ci m'apparaissent comme totalement nouveaux.

       Dear And Unfamiliar est un excellent album de soirée pré-sommeil et un encore plus magnifique album nocturne. Au milieu des excellents Grouper, Noveller ou encore Motion Sickness of Time Travel, la musique d'Alicia Merz n'est décidément pas de trop (on aurait au contraire pu craindre l'overdose de (dr)one-woman bands) et prouve avec cette collaboration qu'elle n'est pas qu'un oiseau de passage. La bonne nouvelle est qu'un prochain album, cette fois de nouveau en solo, est déjà prévu pour la fin d'année.

Riton

Dear And Unfamiliar en trois mots : zen, nocturne, complexe


Si vous aimez cet album, vous aimerez peut-être : 

  • Without The World, BIRDS OF PASSAGE, Denovali, 2011 : Premier album d'Alicia Merz sorti en 2010 et réédité cette année sur le label allemand. Probablement le plus folk des projets de ce genre... un premier album magnifique, des morceaux prenants pour les nuits d'hiver (mention spéciale à "Fantastic Frown", qui tourne en boucle chez moi depuis la découverte)

  • Opaque Glitter, LEONARDO ROSADO, FeedBackLoop, 2011 : Un tour de démonstration de drone ambient poignant, intelligent, essentiellement instrumental. Que dire de plus à part que cet album pourrait être une bonne porte d'entrée au style en général...

  • Tragedy, JULIA HOLTER, Leaving Records, 2011 : Cet album de Julia Holter est comme qui dirait légèrement passé à la trappe lors de sa sortie en septembre (du moins presque, Pitchfork m'a devancé en le chroniquant il y a quelques semaines). Pourtant la qualité est bien présente : une musique d'un autre temps, inquiétante et rassurante à la fois, comme une réponse féminine, plus sensible, finalement plus "pop" (je pourrais encore y trouver du Cocteau Twins mais je ne le ferai pas à chaque fois), à la démarche si hermétique, et ô combien intéressante d'un Leyland Kirby par exemple.

  • Sleeping through The Veil Of The Unconscious, MOTION SICKNESS OF TIME TRAVEL, Digitalis Recordings, 2010 : J'ai découvert ce projet relativement tard mais en suis d'entrée tombé amoureux : les mélodies électroniques de Rachel Evans, une fois apprivoisées ont quelque chose de féerique! Seul hic... la musicienne est difficile à suivre tant elle est productive... et sa légère préférence pour des supports cassettes à tirages limités n'est forcement pas très arrangeante...

2 commentaires:

  1. Superbe album en effet ! Et la bonne nouvelle c'est qu'un nouveau Rosado pointe le bout de son nez pour décembre, dont un morceau chanté par Alicia Merz et déjà en écoute ici : http://subterminal.tumblr.com

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  2. Je n'étais pas au courant! merci! On peut dire qu'on est gâtés :)

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