dimanche 1 septembre 2013

Deep Trip, DESTRUCTION UNIT, Sacred Bones Records, Août 2013 (Par Riton)



       C'est indéniable, Sacred Bones excelle dans le jeu du chat et de la souris avec nos sens. Depuis 2007, son catalogue partagé entre voyages mystiques, crasse urbaine et occultisme latent, est constamment agrémenté de nouveaux bijoux... des petits bijoux qui se révèlent être de parfaites armes sonores contondantes qui ne se contentent pas d'élimer nos tympans mais aussi de malmener les esprits. C'est triste à dire mais j'ai bien peur que les amateurs du label ne fassent pas de vieux os... de toute façon c'est dans les vieux pots qu'on fait les meilleurs sourds!

       Le petit dernier, Deep Trip, en rajoute une couche (il faudra d'ailleurs en changer souvent au cours de l'écoute) en mode unité de destruction massive, ravageur au point qu'il serait purement indécis pour les frangins Ryan et Rusty Rousseau d'essayer de se dédouaner de toutes responsabilités. Introduction toute en larsens, guitares vrombissantes suivis des blast beats inopinés d'un batteur qui semble dire "Coucou c'est moi, vous allez m'entendre!"... il leur faudra tout de même un sacré alibi pour panser nos acouphènes. Tant d'énergie d'un coup c'était suspect mais pas de raison de se méfier et surtout pas la force... les jambes coupées en même temps que l'herbe sous nos pieds. Bonne technique que de mettre sur les rotules pour mieux maîtriser... faire passer la pilule (entre autres substances) des nuages de fumées qui planent sur le reste du disque. Car si la fougue pointe son nez avant tout, l'ensemble se montre rapidement bien plus surprenant que le synth-punk bas du front (ou encore que l'ensemble de la discographie de The Reatards, dans lequel jouait Ryan Rousseau) des deux premiers albums, à l'époque où Alicja Trout et le célèbre et malheureusement défunt Jay Lindsey dit "Reatard" composaient un Destruction Unit réunissant alors à lui seul les trois quarts du vivier de musiciens de la scène indépendante de Memphis (Ryan Rousseau a rencontré Alicja Trout au sein des Black Sunday, qui elle-meme a joué avec Jay Lindsey dans C.C Riders, Lost Sounds, Nervous Patterns, qui lui-même a joué avec Ryan Rousseau dans les Reatards... sans compter les projets individuels, les groupes d'un soir et j'en passe...).

       Assommés, les membres engourdis, l'album nous plonge la tête dans l'aquarium, brasse les chaleurs rocheuses traversées par le groupe lors de son déménagement à Tempe, au pied du désert de l'Arizona. L'on retrouve par instants le psychédélisme aride de Sonoran mais chaque remontée se fait de plus en plus violente sous le poids des bourdonnements électriques de la production enregistrée par Ben Greenberg de The Men. Le trip profond chatouille l'intérieur, sans pitié, harassant, parfois aux limites du malsain (certaines sonorités tiennent presque du mélange hardcore/black metal...), proche de ce à quoi pourrait ressembler l'atmosphère dérangée et bordélique d'une salle de shoot échangiste : entre joie, pesanteur et interdit. Les oreilles déjà bien arrangées, on en prend aussi plein les yeux avec cet artwork en illusion d'optique... perturbant!

       En résumé "une odyssée spirituelle de dégoût intérieur sadomasochiste faite de chansons sur l'amour et la liberté", c'est pas moi qui le dit mais je plussoie! Encore merci à Sacred Bones et rendez-vous déjà pris le mois prochain avec la Nature Noire de Crystal Stilts... ce sera sûrement un peu plus doux mais on ne sera pas dépaysé!

Riton

Deep Trip en trois mots : destructeur, noisy, planant

Écouter l'album en entier : http://www.deezer.com/fr/album/6746810

Si vous aimez cet album vous aimerez peut-être :

  • Void, DESTRUCTION UNIT, Jolly Dream Records, 2013 : Le disque qui précède Deep Trip et également le plus enfumé de toute la discographie. Après des morceaux comme "Druglore" ou "Smoke Dreams", on comprend pourquoi ils sont aussi perchés.

  • The HorrorPOP. 1280, Sacred Bones Records, 2011 : Ça c'est qu'on appelle exceller dans le garage/post-punk glauque! Imps of Perversion, le petit (mais costaud) nouveau, sorti ce mois-ci chez Sacred Bones, bien que relativement plus calme, vaut également son pesant de noix de cajou.

  • Leave HomeTHE MEN, Sacred Bones Records, 2011 : La machine de guerre de Peter Greenberg et ses amis signant son album le plus rageur, électrique, aux croisées du punk (A l'instar de Deep Trip on se demande quand même parfois si l'on est pas tombé chez les punk coreux), de la noise, du garage, et probablement le meilleur au regard de ce qui est venu après...

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire