jeudi 7 juin 2012

Valtari, SIGUR RÓS, EMI, Juin 2012 (Par Gagoun)



       Sigur Rós, vous connaissez ? Oui bon d'accord ça sera pas la découverte du siècle mais cette dernière, je la laisse bien volontiers à mon Riton. Car cet album, bien que sorti sur une major, une fois n'est pas coutume, et attendu par beaucoup de monde, est un véritable coup de cœur, une surprise là où on ne les attendait pas vraiment, nos islandais préférés.

       Pour rappel Sigur Rós est un groupe de post rock islandais adoubé par leur compatriote Bjork et Radiohead en son temps, et ce depuis 1994. Ca c'est ce qu'on lit partout. Pour le reste c'est un univers lunaire, soyeux et éthéré fait de lentes montées en tension, de batteries souvent épurées, de lignes de basse voluptueuses, de pianos aux belles mélodies, de cordes délicieusement arrangées par le quatuor Amiina. Sigur Rós c'est aussi son leader énigmatique Jónsi qui, de sa voix de fausset, chante en islandais, dans une langue imaginaire ou plus récemment en anglais et joue de la guitare électrique avec un archer. Mais si souvenez vous, Jimmy Page s'acharnant sur sa guitare et malmenant ce pauvre archer qui n'avait rien demandé pour sortir des sons douteux, toujours psychédéliques. Ici point de tout ça, le Jónsi fait plutôt dans l'ambient, les nappes de guitares afin de créer un cocon agréable. Sigur Rós c'est enfin un groupe que l'on adore ou que l'on déteste. Génial, inventif, touchant pour les uns, chiant, lent, creux pour les autres. Vous l'aurez compris je fais partie de la première catégorie.

       Si le groupe a toujours privilégié les ambiances épurées, les atmosphères plutôt que les riffs (oui c'est un groupe de rock quand même!), il a aussi su prendre le contre pied de cette démarche via son dernier album en date Með suð í eyrum við spilum endalaust (quelle idée de chroniquer un groupe islandais...) dans lequel le groupe s'ouvrait au monde, chantait dans la langue de Shakespeare, accélérait le rythme, collaborait avec un orchestre philharmonique et des chœurs londoniens, enregistrait à Abbey Road plutôt que dans leur piscine désaffectée et aménagée en studio à Álafoss. Bref un vrai album pop, universel.

       Alors que l'on aurait pu croire qu'ils continueraient sur cette lancée, cette mue, et bien non, Sigur Rós nous revient en 2012 avec un album de repli total, peut-être plus épuré, éthéré et proche du néo classique que jamais. On est plus près ici d'Olafur Arnalds, de Múm ou de Nihls Frahm que de Mogwai et compagnie. Et pour mon plus grand bonheur. Absolument surprenant! Alors cet album divisera, encore une fois et de manière plus clivante encore. Mais moi j'ai choisi mon camp. Ce chef d’œuvre accompagnera mes nuits pendant un bon moment. A travers ses cordes, tantôt dissonantes, tantôt lumineuses, ses détails, ses bruits, cette électro légère, percent parfois une voix ayant abandonné l'anglais, une chanson, une basse ou une batterie, des chœurs, le point d'orgue étant surement "Varúð" et son envolée vers les cieux islandais. Les percussions sont donc très en retrait et finissent par disparaître totalement sur la deuxième partie de l'album, le chant et la basse aussi d'ailleurs. Le piano prend alors le relais à coup de mélodies enfantines et touchantes comme sur "Varðeldur" ou sur la fermeture, le bien nommé "Fjögur píanó". Comme un repli progressif sur soi. Seules les cordes restent une constante, un repère. Dans cette logique, Valtari fait la démarche inverse d'un ( ) qui, au contraire, proposait une lente montée vers une tension puis une libération électrique.

       Au final cet album est réellement un chef d’œuvre, une réelle surprise de la part d'un groupe qui avait déjà pourtant tout prouvé. Il possède un univers qui lui est propre, un univers de nuit, un univers lunaire où l'enfance a une place importante, un univers où il est bon de régresser, de s'enfermer, de se rappeler l'innocence et l’insouciance.

       Si les majors pouvaient sortir plus souvent ce genre d'albums...

Gagoun

Valtari en trois mots : néo classique, enfantin, autarcique


Si vous aimez cet album, vous aimerez peut-être :

  • ( )SIGUR RÓS, Fat Cat, 2002 : Comme évoqué ci-dessus, cet album était mon préféré du groupe islandais jusqu'à ce Valtari. Des mélodies superbes, une cohérence totale et un final cathartique. La bande de Jónsi se fait ici plus rock mais évoluant toujours dans cet univers qui lui est propre. A écouter de toute urgence.

  • Lumière, DUSTIN O'HALLORAN , Fat Cat, 2011 : Les Olafur Arnalds, Nihls Frahm et autres A Winged victory for the sullen ayant largement eu la part belle lors de nos chroniques précédentes, j'en profite pour vous faire partager un petit bijou néoclassique/ambient né de l'imaginaire du pianiste américain Dustin O’Halloran. A la fois contemplatif et intense, reposant et sensible. Une belle œuvre "de chambre" classique et moderne où l'ambient et le silence ont autant de place que les mélodies simples de piano et les envolées de cordes.

  • Summer make good, MÚM, Fat Cat, 2004 : encore des islandais ! Ces rois du glitch et de l'electronica sortent ici leur album le plus sombre, enregistré dans un phare abandonné. Plus difficile d'accès que ces prédécesseurs, cet album comprend de véritables perles où l'electro et les instruments acoustiques sont parfaitement en équilibre. Leur univers onirique et enfantin n'est pas sans rappeler celui de Sigur Rós.

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