mardi 31 mai 2011

California Lite, KEY LOSERS, P.W Elverum & Sun, Mai 2011 (Par Riton)



       Les supergroupes, c'est mal! Oui, je sais, je l'ai déjà dit! Du moins je l'ai déjà évoqué lorsqu'il était question le dernier album de Danielson en février. Mais rappelez-vous, cet album donnait justement une exception à mon aversion tenace pour les supergroupes. Une fois n'est pas coutume, une nouvelle exception s'est présentée à moi à l'écoute de ce premier album de Key Losers.

       Sur le papier le résultat s'annonçait déjà plus que prometteur : Key Losers (visiblement sans référence au morceau des Guided By Voices), groupe de Portland créé par la chanteuse et guitariste Katy Davidson (Dear Nora/Lloyd and Michael) avec un backing band royal composé d'Andrew Dorsett (basse/chant) et Eli Moore (chant) de Lake, Greg Campanile (percussions) et Tom Filando (guitare/chant) de Total Noise, Karl Blau au saxophone et pour finir, le canadien Nick Krgovich des No Kids au clavier et au chant. Ajoutons à cela la participation de Phil Elverum (Mount Eerie/The Microphones/D+) en tant qu'enregistreur (pas l'appareil, le monsieur!) et producteur. Avouez que cela est alléchant! Pour ma part la simple lecture de ces noms me rend obligatoirement tout chose et me rappelle ces folles heures d'écoutes consacrées à la fine fleur de chez K Records, les productions chaleureuses et prenantes des scènes de l'ouest américain... (Portland, Anacortes, Olympia...).

       Après une introduction des plus chaotiques, bruitistes et et peu ragoutantes ("California Lite"), les Key Losers nous immergent dans un univers singulier situé aux confins de la pop et de la folk, baigné  de belles mélodies lumineuses et jazzy. Il faut dire que ceux-ci savent y faire en matière de jolies compositions : la voix de Katy Davidson, qui n'a pas changé d'un poil depuis la période Dear Nora, semble touchée par la grâce, reprise en choeur par ses camarades et portée par une instrumentation particulièrement juste. Guitares claires, basses rondes et groovy, claviers discrets et percussions timides sont au programme de ces douze titres géniaux et attachants, autant de ballades desquelles il est si dur de sortir. Parfois, comme pour brouiller les pistes et déstabiliser, le groupe se lance dans des parties plus "free" littéralement habitées (on notera d'ailleurs l’extrême versatilité du jeu de Karl Blau au saxophone), sortes de micro-embûches disposées dans le paysage sonore (et visuel, s'il on se réfère à l'artwork impressionniste signé Jake Longstreth) si agréable dépeint par la bande de Portland. Celles-ci ne font que rappeler l'extrême sérénité dégagée par l'ensemble de l'album.

       Parlons maintenant de production... Si la présence de Phil Elverum derrière les manettes laissait présager un de ces habituels enregistrements lo-fi (comme il avait notamment pu le faire avec Thanksgiving... sans parler de ses propres productions), ici il n'en est rien. Point de saturations naturelles, de larsens ou autres bruits de bande, tous ces charmants "défauts" dont il est spécialiste... simplement enregistré en live, avec le strict minimum d'overdubs, California Lite brille par une certaine harmonie et fleur bon l'analogique.

      Harmonie, voici un terme qui ressort particulièrement vainqueur de cet album... California Lite sonne comme une oeuvre-somme, le parfait mélange de ce que chacun de ces musiciens sait faire de mieux, comme si Katy Davidson, non contente d'apporter l'entière composition avait eu l'habile bienséance de gratifier ses petits copains d'un "faites comme chez vous". Car c'est bien chez nous que nous sommes lors de cette écoute, ou plutôt chez eux... histoire de se conforter dans l'idée que la région de Portland est bien un de ces eldorados de l'indie américain, le théâtre de petites perles auditives comme celle-ci. En tout cas moi j'y suis, et  j'y reste!

Riton

California Lite en trois mots : harmonieux, serein, mélodique

En écoute intégrale : http://www.pwelverumandsun.com/elv023

Si vous aimez cet album, vous aimerez peut-être : 

  • Mountain Rock, DEAR NORA, Magic Marker Records, 2004 : la voix de Katy Davidson vous a beaucoup plu et vous en voulez encore? Deux solutions : réécouter California Lite ou découvrir Dear Nora, son premier groupe. Mountain Rock est probablement le plus bel album servi par la chanteuse avant la création des Key Losers : une guitare, du chant et une folk acoustique des plus touchantes...

  • Let's Build A Roof, LAKE, K Records, 2009 : Lake est à mon goût un des meilleurs ambassadeurs actuels du catalogue de K Records. En témoigne ce très bel album, prenant, attachant et regorgeant de nombreuses petites subtilités musicales... la pop comme on aimerait plus l'entendre!

  • Clothes Your I's, KARL BLAU, Knw-Yr-Own Records, 2001dernier album pré-K Records (pour la petite anecdote, Knw-Yr-Own a été fondé par Bret Lunsford et K Records par Calvin Johnson, tous deux anciens membres des cultes Beat Happening), Karl Blau peut être considéré comme un multi-instrumentiste de génie, capable des plus belles expérimentations. Clothers Your I's est un de ces albums qui sortent considérablement du lot...

  • There The Open Spaces, SLEEPING STATES, Misra, 2007plus intimiste (forcement, il s'agit d'un one-man-band) et plus lo-fi que les Key Losers, mais similaire dans sa sérénité (et parce que ça me fait plaisir d'en parler), ce premier album de l'oeuvre (encore jeune) de Markland Starkie est tout bonnement magique.

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